La réunion a fait ressortir une inquiétude marquée devant un risque de dépossession et des hésitations sur la manière d'upgrader l'offre urbaine de Vénissieux au niveau de celle attendue dans une métropole mondialisée et mondialisante, centrée sur la deuxième ville de France.
Une ville qui se définit en négatif, selon ce qu'elle n'est pas.
Malgré les manques que les participants ont signalé tout au long de la réunion, ils ont souligné avec force que Vénissieux ne peut pas être considérée comme une ville dortoir où les gens rentreraient le soir pour dormir et repartiraient le lendemain pour aller travailler ou se divertir ailleurs. Les équipements et les activités [associatives surtout] présents dans le quartier permettraient à Vénissieux de s'éloigner de cette image.
Des mondes parallèles.
Selon les habitants, la différence majeure entre les deux quartiers est le type de population et son origine. Les Minguettes, contrairement à Charreard, n'hébergerait pas un nombre important d'immigrés primo arrivants, mais plutôt des personnes ayant des parents ou des grands-parents d'origine immigrée.
En décrivant les habitudes des étudiants de Bioforce logés dans les appartements de l'école [dernier étage des tours], les participants ont exprimé le regret que les étudiants préfèrent se retrouver entre eux plutôt que sortir dans le quartier, à cause du manque d'activité et de vitalité de ce dernier. [Un manque d'attractivité qui pourrait également s'expliquer par la faible ouverture envers les non résidents ou les résidents temporaires comme ces étudiants, qui ne sont pas vraiment du quartier.]
À propos des habitants de Vénissieux se rendant au centre-ville de Lyon, certains participants ont signalé des dynamiques d'intégration, c'est-à-dire d'adaptation à un type de fonctionnement urbain autre que celui de Vénissieux. Pour certains, cela passerait par les pratiques vestimentaires, proches de celles des habitants du centre-ville de Lyon afin de « passer inaperçus » [sans grand succès, semble-t-il], pour d'autres, cela tiendrait au contraire des comportements. Un participant a ainsi pris l'exemple d'un de ses amis qui, lorsqu'il était au centre ville, a fait l'expérience d'une politesse urbaine qu'il n'aurait peut-être pas vécue dans son quartier et qu'il aurait ainsi adoptée dans ce nouvel espace. [Ce que l'on peut notamment retenir ici, c'est le fait qu'il soit ressenti comme nécessaire par certains de s'intégrer, comme dans un pays étranger, en se rendant à Lyon.]
L'étrangeté n'est pas forcément une question de kilomètres.
Les habitants ont souligné à plusieurs reprises leur attachement pour le quartier, y compris avec ses logiques et ses limites de fonctionnement. [L'échelle du quartier est l'échelle d'identification majeure pour les habitants qui semblent craindre une sorte de dilution de leur identité dans les passages d'échelle - ville, agglomération, etc.]
Les participants étaient tous d'accord sur le fait que la représentation médiatique de la ville et du quartier étaient le fruit de clichés exagérant les traits de la réalité. Ils sont notamment souvent décrits comme des lieux de violence hors du contrôle étatique [comparaison avec Sarajevo] où les clivages culturels et religieux seraient très marqués [burka], alors que la situation n'?est pas vécue comme telle au quotidien par les habitants. [On peut néanmoins s'interroger sur le fait de savoir si ce décalage tient uniquement du forçage médiatique ou s'il n'est pas lié aussi à une différence de perception des faits, entre habitants habitués à certaines pratiques et le reste de la population, qui les considère comme exceptionnelles.]
À la recherche d'une identité, entre fantasme et réalité.
Les participants ont expliqué qu'il n'y avait pas de rapport de voisinage véritablement réciproque entre les Minguettes et Charreard, dans la mesure où c'est surtout les habitants de Charreard qui utilisent les Minguettes.
Les habitants de Charreard fréquentent les Minguettes pour avoir accès à certains services (scolarisation, services administratifs, clubs de sport, etc.) qu'ils ne trouvent pas dans leur quartier.
Les participants ont signalé que le plateau des Minguettes a un pouvoir d'attraction non négligeable surtout grâce à ses équipements sportifs et de formation [école de musique, Bioforce, etc.] Le problème étant que ces flux restent circonscrits aux équipements qui les génèrent, dans engendrer de brassage de populations pour l'instant.
Selon certains participants, vu qu'une composante importante de la population des quartiers des Minguettes et Charréard est d'origine immigrée, la plupart de ces personnes rentre dans leur pays d'origine lors des vacances, ce qui viderait le quartier de la plupart de ses résidents.
Un fonctionnement urbain basé sur le rôle central des Minguettes.
Tous les habitants ont signalé que le centre-ville de Vénissieux était peu attractif surtout si on le compare à ceux d'autres communes des alentours.
En partant du constat qu'auparavant Vénissieux et Saint-Fons n'étaient qu'une seule et même entité, les habitants souhaiteraient voir davantage intégrées les deux communes, du point de vue fonctionnel et résidentiel, ce qui permettrait une meilleure complémentarité spatiale, au profit de Vénissieux notamment. [Il est intéressant de noter que les participants ont fait référence à la commune de Saint Fons comme espace de proximité choisi, alors qu'ils ignorent complètement une grande partie de la commune de Vénissieux, comme la zone résidentielle au sud-est et le quartier des Moulins au nord.]
Vénissieux marcherait moins bien que Saint-Fons du point de vue de l'offre urbaine liée aux loisirs et à la recréation. Ces derniers aspects sont plus développés dans la commune limitrophe, ce qui explique pourquoi on s'y arrête plus volontiers, y compris pour de simples promenades urbaines.
Les habitants ont reconnu un écart énorme [en termes d'urbanité : densité, diversité, serendipity] entre leur centre-ville et celui de Lyon. À tel point d'ailleurs qu'ils parlent d'intégration entre les populations des deux espaces, comme si elles étaient étrangères l'une à l'autre.
Pour décrire en quoi consiste la différence entre le centre-ville de Lyon et celui de Vénissieux, les habitants ont pris l'exemple des vacances. Le centre-ville de Lyon représente pour eux un lieu agréable, à utiliser pour le loisir et qui, surtout, est perçu comme exotique par rapport à leur quotidien [ce qu'on attend en général d'un lieu de vacances].
Certains participants ont décrit les processions de voitures chargées de biens de consommation au moment des vacances estivales, en partance pour les pays d'origine d'une grande partie des habitants de Vénissieux.
Face à cette affirmation, d'autres participants [d'origine immigrée] ont déclaré que cela relevait plutôt d'un cliché que d'une pratique réelle et que la plupart de cette composante démographique du quartier partait en vacances comme les autres, sans surcharger les voitures, ou en avion pour aller dans des pays différents de leur pays d'origine et pour faire du tourisme.
Prendre part.
Les habitants ont signalé qu'ils ne savent pas grande chose sur l'activité de cet école de formation [dans le domaine de l'humanitaire]. Cependant, sa présence dans le quartier est importante en termes qualitatifs [siège très beau] et quantitatifs [nombre d'étudiants et de logements]. C'est pourquoi, ils ont proposé d'organiser des journées de rencontres et débats avec les habitants, pour mieux connaître cet établissement du quartier.
Certains participants ont pointé une autre différence entre ce qui caractérise Lyon et Vénissieux : l'engagement politique des jeunes et sa visibilité dans les espaces publics, où il constituerait un sujet de conversation commun.
Les équipements et l'urbanisme sont-ils la réponse ?
D'après certains habitants, le projet de construction de nouveaux logements pourrait redynamiser le quartier surtout grâce à l'arrivée de nouvelles populations.
Certains participants considèrent que la présence de grandes enseignes commerciales pourrait contribuer à développer Vénissieux. Face à ce constat, d'autres participants ont signalé que le plus dur serait de « trouver les enseignes qui ont le courage de s'implanter ici ». La réputation du quartier (pauvreté et violence) découragerait, selon eux, toute hypothèse d'installation.
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